Sulawesi (13) ... Rantepao, en pays Toraja (Tana Toraja)
Rantepao, Sulawesi
17 mars - 23 mars 2009
Environ 41 000 habitants
Un village Toraja
PETITE NOTE
Même si j'ai perdu un nombre très élevé de photos, je crois bien que mon texte et mes images réchappées vous permettront tout de même d'avoir une bonne idée de ces trois jours de visites que j'ai effectuées en pays Toraja. Finalement je n'ai eu besoin que d'ajouter deux photos pour illustrer adéquatement mon texte. Il en manque une cependant : le panorama cinq étoiles tout près de Batutumonga au nord de Rantepao. On peut y voir des rizières en terrasses avec arrière-fond de montagnes... Tout simplement génial! |
On vient à Rantepao, dans le sud de l'ile de Sulawesi ou Celebes, surtout pour y découvrir la culture traditionnelle encore très vivante d'un des peuples (en plus du peuple Minahasa autour de Manaddo, des Gorontalis autour de Gorontalo, des Bugis au sud-est de Makassar et des Makassars) qui habitent cette île des plus originales, le peuple Toraja.
Ils sont environ 650 000, dont 450 000 dans la région qui entoure Rantepao. Même après avoir subi les influences chrétiennes et musulmanes, la culture traditionnelle Toraja est demeurée bien vivante jusqu'à nos jours. J'ai donc pensé profiter de ce texte pour vous présenter le pays Toraja à partir des principes éthiques de base qui guident les Torajas dans le quotidien de leur vie personnelle et sociale.
Mélange des croyances traditionnelles et chrétiennes
Se promener dans la campagne toraja, c'est prendre contact avec les manifestations concrètes des croyances ancestrales de cette communauté.
Sept grands principes éthiques constituent ce qu'il est convenu d'appeler l'Aluktodolo ou le culte des ancêtres, de "ceux avant". Ces principes sont transmis oralement de génération en génération.
Les règles de vie des Torajas
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Principe 1 : Vivre en harmonie avec la terre et le riz
Dans les rizières,
on peut y prendre aussi des poissons
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Principe 2 : Respecter la maison, celle des vivants avec fumée et celle des morts sans fumée (le tombeau)
Maison des Vivants :
à droite, les maisons (tongkonan), à gauche, les greniers a riz
Maison des Morts :
tombeau en forme de buffle
Maisons des Morts dans le roc
Maison des Morts dans une caverne
avec les effigies des défunts
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Principe 3 : Vivre en harmonie avec le monde animal...
Trois animaux sont au coeur de la vie sociale, familiale et religieuse des Torajas. En plus de nourrir les humains, on les offre en sacrifices aux dieux pour s'attirer leur faveur.
- le coq : "Le coq symbolise le courage, le sens de la justice. Les combats de coqs organisés lors des funérailles sont des témoignages de la grandeur d'âme du défunt." (Wikipedia)
- le porc : "Qu'il serve aux sacrifices, à la nourriture ou qu'il nettoie les allées en mangeant les ordures, le porc joue un rôle essentiel." (Wikipedia)
- le buffle : "Les rituels mortuaires donnent lieu à de nombreux sacrifices de buffles. Le premier buffle immolé l'est toujours à l'ouest de la maison. La gorge tranchée par un violent coup de parang (sorte de machette), celui-ci va tomber et agoniser en quelques secondes. Des enfants se précipitent pour recueillir son sang dans des tubes de bambou. Les Toraja croient que les buffles accompagnent le défunt au pays des morts. Pour l'aider à tenir son rang dans l'au-delà, on en immole le plus grand nombre. C'est là un signe de prestige." (Wikipedia)
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Principe 4 : Vivre ensemble en harmonie
Les naissances, les mariages et les décès deviennent donc des moments privilégiés pour la famille et les amis du village de se retrouver et de "fêter" ensemble.
Mais à la base des croyances des Torajas, il y a la croyance en Dieu, et l'on y retrouve trois niveaux de divinité :
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Principe 5 : D'abord aimer le Dieu supérieur, créateur de l'univers
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Principe 6 : Offrir de nombreux sacrifices aux dieux protecteurs des diverses activités humaines (Dewata), manifestant ainsi sa dévotion
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Principe 7 : Permettre à l'esprit des morts de se transformer en semi-divinité et d'accomplir dans les meilleures conditions son ultime voyage dans l'au-delà, vers le paradis toraja, et ainsi continuer à protéger la famille et le village
Les rites funéraires des Torajas
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Les funérailles peuvent être reportées de plusieurs mois si, par exemple, des membres de la famille sont dispersés au loin. En attendant, la personne décédée est considérée comme "malade" et elle repose donc dans un cercueil placé dans une chambre spéciale de la maison.
J'ai pu assister aussi à deux moments différents d'une cérémonie funéraire, et ce, dans deux villages différents.
Ma première journée de visite, c'était la journée de l'arrivée des invités et la présentation de leurs offrandes à la famille du défunt, buffles ou porcs. Quant à nous les étrangers, on offrait à la famille soit quelques kilos de sucre ou encore des cigarettes.
Du côté des maisons, on a installé un genre d'abri surélevé haut en couleur : y est déposé le cercueil du défunt et dans la partie du bas, se tiennent les membres de sa famille.
En face, les invités s'installent sous la partie inférieure des greniers à riz transformés pour l'occasion en espaces de rencontre : on y jase, on y mange et boit, ou encore on y joue aux cartes. Les enfants, de retour de l'école, s'amusent entre eux.
À leur arrivée, les invités sont annoncés : ils s'avancent alors en silence dans un genre de défilé, précédé de leurs buffles/cadeaux et sont reçus par la famille de la personne défunte, ce jour-là, les petits-enfants du défunt..
Et tout autour, on s'affaire à ligoter les porcs à des bouts de bambous, pour les transporter un peu à l'écart de la place centrale pour y être sacrifiés, Leurs cris stridents créent l'ambiance de cette journée. Ils seront ensuite dépecés et cuits dans des morceaux de bambous pour nourrir les invités durant tous les jours de funérailles.
Le jour suivant, c'est au sacrifice des buffles que j'ai pu assister.
Dès qu'on annonce le début de l'activité, tout s'arrête et l'attention des invités se tourne vers le centre de la place, là où aura lieu le sacrifice. Et c'est dans la joie que se fera le sacrifice. Le jour de ma visite, on y a tué sept buffles. Une expérience assez difficile à supporter !
La viande des sept buffles sera partagée entres divers villages. Il y a des buffles qui seront épargnés... ils seront alors vendus et permettront à la famille de défrayer les coûts des funérailles.
Puis ce sera l'étape ultime des funérailles : l'enterrement., qui pourra avoir lieu plusieurs mois plus tard. Le corps sera alors transporté au lieu de la sépulture en procession. Mais les femmes et les enfants devront revenir au village car ils ne peuvent assister à la sépulture même.
Ce genre de bateau sera porté par plusieurs hommes
et transportera le cercueil du défunt.
Et c'est dans un espace creusé dans le roc (rocher, flanc rocheux de montagne, falaise ou caverne) que sera déposé le cercueil. Y sera érigé une statue à l'effigie du défunt (tau tau).
A chaque cérémonie funéraire, on érigera aussi une pierre, dont la taille dépendra de l'importance de l'événement et donc de la personne décédée. Ces mégalithes sont placés au centre de la place où l'on abat les buffles (rante)
Ici, l'ensemble des mégalithes du village de Bori.
Pour une autre expérience indonésienne des funérailles
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